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                           Numéro 14 - juillet 2003
 UNE PORTE OUVERTE
Pourquoi, après le pigeonnier-octroi, s’offrir une belle porte restituée ? Nous avons besoin de mémoire.
Le moindre de nos gestes vient de loin : cueillir une fleur, aérer une plate-bande, labourer, semer, construire, détruire, regarder l’autre (et même avoir envie de lui en coller une, voire pire !), tout ça, qui est l’abc de nos vies à la fois solitaires et très socialisées (une maison, un village, l’un et le multiple, l’individu et la foule), tout ça, chaque génération croit évidemment l’inventer pour elle même, et sait bien, en même temps, que d’autres, avant, bien avant, ont eu les mêmes gestes, connu les mêmes désirs, à la fois celui de faire du neuf et celui de retrouver une mémoire, des mémoires.
Nous venons de quelque part : cela concerne, entre autres, notre histoire de citoyen et nos paysages, peignés par la vigne, ourlés par les céréales, piqués de bois, parcourus par des voies de passage multi-séculaires.
Dès lors le désir de restituer dans un de ses états antérieurs connus, la porte de cette cité de Maignaut- Tauzia paraît, non seulement légitime mais naturel. Puisqu’il s’ agit, avec un morceau de mémoire, de s’inventer des lende- mains de vie commune.
Je m’ explique : chaque village gascon vit aujourd’ hui une aventure peu ordinaire. Après les désastres, au plan humain, de
l’exode rural, d’une désertification relative, de la tentation folle des « friches », vient le temps de l’amalgame des nouveaux ruraux de toutes provenances. D’abord les agriculteurs heureusement demeurés à la terre et attachés pour l’essentiel à des démarches d’excellence, fidèles à des produits nobles. Avec eux et par « vagues » successives, des salariés de la ville soucieux d’un cadre de vie moins stressant, des adeptes du temps partagé entre la grande ville et le petit village, de plus en plus nombreux grâce aux transports plus rapides, enfin des Européens du nord irrésistiblement attirés, pas seulement par le soleil, mais par une mémoire qui nous est commune, celle de la construction ancienne d’un monde né autour de la Méditerranée.
Si aucun
des protagonistes de cet amalgame n’avait l’envie de cette mémoire, l’affaire serait vite conclue, on remplacerait nos bastides, castelnaus et mottes féodales, par des cités de loisirs, façon camp de vacances à tous les prix. Notez que parfois on est passé à l’acte ! Nos paysages ruraux – parce qu’ils sont habités – ont heureusement été épargnés par ces âneries mercantiles qu’on regrette déjà ailleurs.
À sa façon micro-locale, l’entreprise des passionnés de la Porte témoigne de ce besoin vital de mémoire, ce désir de vivre ensemble une aventure aux contours imprévus. J’ai le sentiment d’enfoncer des portes ouvertes. Remarquez, ici, ça tombe plutôt bien !
Michel Cardoze
 Le projet de restauration :
la voie aussi est ouverte
Depuis l’attribution, en octobre 2002, du titre de « Patrimoine caractéristique gascon » par la Fondation du Patrimoine, relatée dans MPI n°12, nous avons poursuivi avec tenacité l’élaboration de notre projet. Nous vous présentons aujourd’hui en pages intérieures, l’architecture de la future porte restaurée.
Les autorisations nécessaires ont été obtenues notamment :
◆ l’étude de l’architecte Julien Tajan a été validée par le Service départe-
mental de l’architecture et du patrimoine,
◆ les propriétaires des deux maisons mitoyennes nous ont donné leur
accord pour apporter des modifications à leurs toitures,
◆ la demande d’autorisation de travaux a été visée par les services de
l’équipement et une décision favorable nous a été notifiée par le maire,
◆ l’Association pour la Préfiguration du Pays d’Armagnac a attesté dans un courrier à Monsieur le Préfet que le projet répondait bien aux objectifs de la Charte de Pays. Suite page 2 ➜
 











































































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