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Château du Tauzia
Qui sauvera le
 Il y a longtemps que le château duTauzia est une ruine ouverte à tous les vents. En 1715, lors de sa vente à François de Lafourcade du Pin, le château était au bord de la ruine. Le toit s’effondrait.Vers 1810,
les experts du cadastre mentionnent « un très vieux château aban- donné et dont on ne voit plus que les quatre principales murailles et deux tours ». La tour d’escalier en saillie sur la façade principale avait déjà disparu à cette époque, d’après le plan cadastral de la commune, daté de 1816. Depuis, la silhouette du château n’avait pas beaucoup changé. On aurait dit volontiers, selon l’expression consacrée : « ça durera plus longtemps que nous ! ». Pourtant, à l’époque où j’étudiais, le château à la demande de Maignaut-Passion, on pouvait observer des points faibles dans les murs de la façade principale et un effondrement récent, dont témoignent une série de photos prises entre 2005 et 2007. En février 2021, ces points faibles ont cédé. Un effondrement a emporté la partie centrale de la façade, ouvrant une large brèche dans le mur du château. Le château modernisé
C’est probablement à la charnière des XVe et XVIe siècles que les propriétaires d’alors, les Marestaing, avaient profondément trans- formé le château. Le premier étage, percé jusqu’alors par d’étroites ouvertures, avait été rendu habitable. La façade sud-est (celle qui s’est effondrée) était devenue la façade principale. Un nouvel accés y avait été aménagé par la construction d’une tour contenant un escalier à vis. Six grandes fenêtres à meneaux et traverses, avaient été ouvertes, laissant entrer la lumière. Ces fenêtres étaient décorées de moulures et pour cinq d’entre elles surmontées d’une archivolte horizontale, retombant de chaque côté sur des consoles sculptées. Les motifs de ces consoles étaient variés : un petit personnage aux bras levés, des têtes d’hommes, des feuilles de chêne ou d’autres motifs végétaux. Pour créer ces fenêtres, on avait condamné les cheminées du second étage. Des cheminées monumentales adossées à un mur de refend nouvellement construit à l’intérieur du château les avaient remplacées Jusqu’en 2021, une large brèche verticale s’ouvrait à l’emplacement de la tour d’escalier, détruite depuis au moins deux siècles. Il restait quelques vestiges de la cage d’escalier cylindrique à l’intérieur du châ- teau. L’encadrement d’une porte ouvrant autrefois sur le second étage restait suspendu au-dessus du vide. On observait encore les arrache- ments de quelques marches. La démolition de la tour d’escalier avait sans doute affaibli la cohésion des maçonneries. Déjà, il y a une quin- zaine d’années, les deux fenêtres superposées de la travée de gauche étaient proches de l’effondrement. L’arc surmontant l’embrasure inté- rieure de la fenêtre du second étage s’était écroulé depuis peu, et l’on voyait dans l’embrasure de la fenêtre les vestiges des meneaux gisant au pied des coussièges1. Le linteau de la fenêtre du premier étage était brisé. Les deux blocs fléchissaient et s’écartaient.
La chute
La maçonnerie a sans doute continué à travailler. C’est peut-être l’une de ces fenêtres, en équilibre instable qui a cédé en février, entraînant dans sa chute tout un pan de la façade. Les derniers vestiges de la tour d’escalier, encore visibles en retrait de la façade, sont tombés. Les deux fenêtres de la travée de gauche ont presque entièrement disparu, à l’exception de quelques éléments d’encadrement et d’appui, et de deux culots sculptés. À droite de l’ancien escalier, la première travée
sont des bancs de pierre ménagés dans l’embrasure d’une fenêtre.
Le château du Tauzia en juillet 2006. La façade principale (à droite) comporte six grandes croisées, de part et d’autre de la brèche laissée par la démolition de la tour d’escalier.
de fenêtres s’est en partie effondrée. Il ne reste de la baie du second étage que quelques vestiges d’encadrement et un culot. Le couvrement de la fenêtre du premier étage est également détruit, à l’exception de l’extrémité droite de l’archivolte et de son culot sculpté. En revanche, la seconde travée de droite avec ses deux fenêtres semble intacte. Un château en grave danger
Le château du Tauzia est inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 14 novembre 1942. Mais que vaut une mesure de protection lorsque les moyens financiers manquent pour consolider les murs ? Les blocs taillés des encadrements de fenêtres, les consoles sculptées, sont maintenant à terre, dans l’éboulis gisant au pied de la façade. Il est encore temps de les récupérer et de les mettre à l’abri. Mais il faudrait étayer la façade pour pouvoir réali- ser cette opération en toute sécurité.
C’est un monument emblématique des fameux châteaux gasconsquirisquededisparaîtreoudumoinsdedevenirune ruine indéchiffrable. Le Tauzia appartient à un ensemble patrimonial exceptionnel qui concentre sur quelques kilomètres carrés le château de Mansencôme, les rem- parts de Valence, l’abbaye de Flaran et des châteaux aux noms aussi prestigieux et universellement connus que Lagardère ou Pardaillan. ● Bertrand Boquien
Détail des deux fenêtres (photo prise de l’intérieur du château). Le voûtement qui couvrait l’ébrasement est tombé, à la fenêtre du premier étage (en bas). Au-dessus, on distingue des blocs moulurés tombés entre les coussièges de la fenêtre du second étage. Ils proviennent probablement du meneau et de la traverse qui divisaient la baie en se croisant (juin 2007).
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